L'étanchéité du bateau

Ces deux techniques pour rendre étanche une embarcation sont déjà connues à la période gallo-romaine. Elles sont différentes et n'interviennent pas au même moment de la construction.

Le calfatage est la technique, probablement la plus usitée, depuis la préhistoire. C'est l'action d'insérer un produit en force dans un assemblage déjà réalisé, au moyen
d'outils qui ne vont pas abîmer le matériau d'étanchéité. C'est cette technique que l'on retrouve pour l'étanchéité du chaland Lyon Saint-Georges 4, notamment pour les bordages de la sole et des joints d'étanchéité au niveau de l'assemblage du bouchain au bordé.

profil des cans des bordages pour recevoir l'étanchéité

Le lutage est l'action de disposer le matériau d'étanchéité au fur et à mesure de l'assemblage du bateau, pour qu'il soit pincé entre les planches. Le signe le plus évident de l'utilisation de cette
technique est le débordement, de part et d'autre de l'épaisseur de la planche, du matériau d'étanchéité. Arles-Rhône 3 est caractéristique de cette technique. Sur Lyon Saint-Georges 4, seuls les bordages de surélévation des bordés bâbord et tribord ont été lutés.

 

 

débordement visible de l'étanchéité entre les planches du fond du chaland Arles-Rhône3 (technique du lutage)

 

 

 

 

l'étanchéité entre les planches du fond du chaland Lyon-Saint-Georges 4, n'est pas visible (technique du calfatage)

 

 

 

 

 

par contre, ici, l'étanchéité du bordage de surélévation du bordé de Lyon Saint-George 4 est visible et bien débordante (technique du lutage)

Les deux types d'étanchéité pour la période romaine en Europe sont à présent bien identifiés : avec de la mousse végétale ou avec des tissus poissés. Parmi toute la documentation consultée, la caractérisation réalisée a été faite principalement sur les mousses, et moins sur les fibres animales et végétales.
Pourtant les informations livrées par une étude plus fine permettraient de mieux comprendre le savoir-faire et l'origine de ces fibres : utilisation brute, choix particulier de certaines espèces...

L'étude de ce chaland va permettre d'aller plus loin dans ce savoir-faire car environ 26 métres linéaires, de calfatage, ont été prélevés. Actuellement, environ 7 métres linéaires ont été déployés. Cela en fait la plus importante surface textile d’Europe conservée à ce jour.

Les tissus poissés dans l’histoire des techniques d’étanchéification des bateaux à coque en bois à l’époque romaine ont été étudiés également, pour les épaves d'Arles-Rhône 3, et
des échantillons de celles de Lyon Saint-Georges. Cependant, les problématiques abordées ne concernent pas le rapport entre les textiles et leur utilisation dans les bateaux. C'est
pourquoi à travers les opérations de conservation menées sur le chaland Lyon Saint-Georges 4, lorsque la question du déploiement des tissus poissés en vue de leur étude archéologique s'est posée, une nouvelle approche basée sur l'histoire des techniques a été mise en place.

Pour étudier ces tissus contenus dans l'étanchéité de Lyon-Saint-Georges 4, il faut pouvoir les mettre à plat. Lorsque l'on prélève un bourrelet d'étanchéité, celui-ci ressemble plus à un morceau de bois qu'à du textile. Comment faire pour le développer ?

Cette petite vidéo vous présente un déploiement (vitesse accélérée)

Mais une fois que les tissus sont mis à plat, ils perdent la trace archéologique de leur mise en oeuvre. Pour pouvoir la conserver, une macro-hypsométrie 3D permet la sauvegarde de celle-ci pendant son déploiement.

macro-hypsométrie d'un tissu

L'analyse des tissus se fait ensuite à différentes échelles :

• l'analyse macroscopique qui permet de connaître l'armure textile (technique de tissage)
• l'analyse MEB qui permet de connaître la nature de la fibre du matériau (végétal ou animal)
• l'analyse au microtome qui permet d'identifier le matériau (coupe transversale de la fibre)
• l'analyse ADN pour connaître le lieu géographique de provenance du matériau par l'étude paléogénétique

                            macroscopie d'un tissu                         microscopie d'une fibre végétale       coupe d'une fibre animale au microtome